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Quel bel été ! Déjà juillet de gagné, on est les champions, chaleur, liesse générale, ambiance totalement francofolle. Pourtant, c’est marrant, en fait non au contraire, j’ai vécu ce fée-stival dans sa facette artistique la plus triste et calme, en tout cas c’est celle-ci qui m’a touchée. Ok vous vous fichez de mes états d’âme et vous avez raison, mais lisez, vous avez de grandes chances de découvrir quelques perles…
J’ai ouvert mes Francos avec Véronique Sanson. Je l’avais manquée lors de son précédent passage à La Rochelle estampillé par ouï-dire comme « le concert le plus hype », pas question d’itérer. Elle avait le smile notre Véro nationale, avec sa petite famille sur scène, son ex Stephen Stills et le fiston canon Christopher Stills, un petit air à la Viggo Mortensen, voyez le genre ? Oui bien sûr, il a du talent aussi, mais moi j’étais venue pour écouter Véro. Ouf on a eu Chanson sur ma drôle de vie, et puis d’autres chansons moins connues, ou pas du tout. Ça doit être tellement soulant pour tous ces vieux chanteurs adulés pour quelques tubes de devoir tout le temps les interpréter…
C’est une des questions que j’avais envie de poser à Bill Deraime, qui dès le début de son concert m’a semblé évacuer Plus la peine de frimer, que j’attendais de toute mon âme, ayant biberonné au bluesman français pendant mon jeune âge. Déception, Bill a annulé l’interview le lendemain pour un problème de santé. J’espère que ça va, Bill… Je vous ai vu passer dans la rue la veille en compagnie de votre femme j’imagine, tous les deux avec vos cheveux blancs, vous étiez beaux…
Mais revenons à ce premier jour des Francofolies, et notons qu’il n’y a pas que Sanson qui a l’esprit de famille car ce 11 juillet fut marqué par la découverte d’Angèle l’après-midi à Verdière, et de Roméo Elvis le soir pendant une Nuit collective à La Sirène.
Une sœur, un frère, chacun leur style accroche-cœur, ils chantent bien, ils bougent bien, ils cartonnent. On les entend ensemble sur J’ai vu, et vous connaissez sans doute leurs tubes respectifs, Drôle de question, et La Loi de Murphy, attention en regardant ce clip vous allez tomber amoureux(se).
Jeudi 12 juillet, des dossiers chauds m’ont empêchée d’aller en concert. Gros regret pour NTM qui a envoyé du gros comme on s’y attendait… Tous les quadras-quinquas ont visiblement adoré. Mais, entendu de la bouche d’une gamine de 16 ans et demi : « Tous ces vieux qui s’arrachent la tête sur NTM, ça fait un peu pitié quand même. » Sic.
A un moment je ne sais plus quand, j’ai vécu un orgasme intellectuel, un flash qui m’a mise de bonne humeur pour tout le reste du festival, une petite expo dans le hall de La Coursive sobrement baptisée Albin de La Simone – dessins. Albin donc, chanteur dandy doux que je voudrais épouser si je n’étais déjà pacsée, nous fée la surprise de dessiner, aussi. Y a pas, les artistes, quand ils s’y mettent, sont bons partout… Fin et drôle, Albin de La Simone raconte sa vie de tournée bien croquée avec des textes-légendes succulents ! A consulter sans modération ici : http://www.dessins-albindelasimone.com/
Le lendemain vendredi 13 juillet, jour de sieste… acoustique. Le concept avait attiré mon attention à la lecture de la programmation. En guise de marchand de sable, Bastien Lallemant, artiste confidentiel, comme il se définit lui-même. Auteur-compositeur interprète, trois albums à l’actif d’une carrière solo, La Maison haute, Plutôt tôt plutôt tard, et Le Verger, qui l’a consacré.
Crédit photo : Pascal Bernard Gecko Production.
Cependant Bastien est bien entouré. Ses bons potes s’appellent Bertrand Belin, Albin de La Simone ou Charles Berbérian avec lequel il se produit en concert dessiné. Mais ceci est une autre histoire. Celle qui nous intéresse ici est la revendication douce du droit à siester. La recherche de Bastien, qui pratique beaucoup la sieste, c’est « comment le monde interagit dans un demi-sommeil ». La sieste acoustique est donc un concert très singulier, jamais le même, avec des artistes invités de toutes notoriétés, dans tous types de salle.
A La Rochelle pendant le festival c’était dans la tour Saint-Nicolas à 16h30, dans la torpeur digestive post-déjeunatoire. Une petite jauge de 50 personnes allongées, un plafond à admirer, des coussins, de la fraîcheur, bonheur ! Les « guests » de ma sieste à moi : Maëva Le Berre, envoûtante choriste et violoncelliste, Albin de La Simone pieds nus, Pascal Parisot dont je vois si souvent le nom côté jeune public sans mettre un visage dessus, maintenant en plus j’ai sa belle voix dans la tête, et le petit fée-nomène dont tout le monde parle, Gaël Faure, qui me fée penser à un chaton. Chacun interprète une chanson de son répertoire, ou de celui d’un autre, les instruments et les voix se mêlent sans jamais s’emmêler sur un fil tendu, celui auquel tient le basculement dans la somnolence. Pas d’applaudissement c’est une consigne, mais les ronflements sont autorisés !
Le soir, se produisaient sur la grande scène Big Flo & Oli, la fée les a interviewés quand ils étaient tout petits, fraîchement émoulus du Chantier des Francos il y a 4 ans… Bravo les frérots. Y avait Shaka Ponk aussi, dont j’ai croisé le chanteur en face du Monoprix le lendemain matin, torse-poil tranquille dans la ville. Vision. Mais moi ce vendredi 13, jour de chance, j’avais Pierre Lapointe au Grand Théâtre de La Coursive pour son spectacle La science du cœur.
Je connaissais seulement Au bar des suicidés, une chanson de 2010 au swing joyeusement désespéré, que j’ai découverte cette année… Autant dire que je ne savais pas à quoi m’attendre. Hé bien, Pierre, qui n’est pas, non bordeeel, le fils de Bobby, m’a cueillie avec des chansons tristes. Fair-play, l’artiste prévient dès le début : « Si vous venez de vous faire larguer, ne rentrez pas chez vous seuls après le spectacle ! » Ses intermèdes entre deux chansons sont éclatants de drôlerie. Eclat de colère, aussi, contre un spectateur et interruption en pleine chanson : « Monsieur, vous arrêtez d’envoyer des textos ou alors vous vous barrez ! » Hé oui, c’est comme les flashs des appareils photo, ça déconcentre. Sa voix, sa scénographie, sa veste à paillettes, sa façon de bouger mesurée, Pierre Lapointe est captivant et sexy. Standing ovation de La Coursive pour le Québécois. Suis bien contente de l’interviewer le lendemain.
12h10, samedi 14 juillet, jour de fête nationale. Pierre est ponctuel, il a la classe, il a l’air d’un (grand) prince, j’en pince !
Crédit photo : Pascal Bernard Gecko Production
La fée : Comment se fée-t-il que vos chansons soient si tristes alors que vous semblez si drôle ? Vous avez eu beaucoup de peines de cœur ?
Pierre Lapointe : Au départ, je suis quelqu’un de lucide et pessimiste, j’ai un regard acide. Je suis fasciné par la mort. La chanson m’a sauvé. Je veux laisser une trace, un testament. L’humour, c’est pour être socialement fonctionnel. Mais je ne veux pas tuer cet aspect déprimé de ma personnalité, même si elle est modulable.
Vous avez tancé ce spectateur hier soir pour le coup des sms. Le déficit d’attention communautaire est votre cheval de bataille ?
On est dans le rapport humain dans un concert. Le show est suffisamment construit pour que je puisse me permettre ce genre de sortie. Tout est préparé, mais sincère, l’émotion reste centrale. C’est aussi pour ça que je demande aux gens de lâcher leur smartphone et leur appareil photo et de regarder juste avec les yeux et le cœur.
J’ai lu que vous conceviez tout, votre costume, votre décor…
Je suis un directeur artistique, je dessine des vêtements, je réalise des clips… et j’ai co-conçu l’éclairage du spectacle comme une narration qui accompagne les chansons.
NDLR : une délimitation, une clôture lumineuse faite d’espèces de sabres star-warsiens aux couleurs changeantes, avec au milieu Philip Chiu le pianiste, Joao Catalao le joueur de marimba, Pierre et ce soir-là en « guest » pour le rappel, Clara Luciani dont je ne peux pas vous parler car je suis passée à côté, j’espère qu’elle reviendra l’année prochaine car tous ceux et celles qui l’ont vue étaient conquis.
Vous êtes prolifique, apparemment vous écrivez très vite… Vous avez vos astuces de création ?
Quand j’écris une chanson, elle existe déjà au-dessus de ma tête, elle flotte. Puis je la couche sur le papier souvent dans une sensation d’urgence. La plus belle des maisons, par exemple, ça faisait quatre mois que c’était dans ma tête, j’ai écrit la première phrase et déroulé la chanson en quelques minutes. Contrairement à certains artistes qui ont des rituels de création immuables, j’écris quand je voyage, quand je vois mes amis, j’utilise une partie de mon cerveau qui est dans le plaisir de la non-réflexion. Je connais assez bien mon métier pour me permettre cette spontanéité, je m’en fous d’avoir l’air fou quand j’appelle un ami à 3 heures du matin pour lui demander sa contribution. La création c’est vivant, c’est comme une conversation.
Si vous aviez une baguette magique pour de vrai, vous en feriez quoi ?
J’irais voir la mort pour savoir ce que c’est.
Page Facebook de Pierre Lapointe
Dimanche 15 juillet, jour de Ouaiiiiiiiiis ! Concert décalé à 19h30 pour cause de Coupe du Monde, ce coup-ci j’y étais, grosse patate la Juliette Armanet, quelle machine à tubes, elle m’a fée penser à Véronique Sanson. Puis j’ai été reconquise par Brigitte, qui m’avait laissée froide l’année dernière sur Balavoine. Toujours sexy en diable dans leurs robes virginales avec un jeu de lumière savamment orchestré pour deviner leurs formes, un ef-fée super esthétique, je me suis chopé un torticolis à force de regarder le grand écran. J’ai été surprise et happée par deux chansons tristes dans leur répertoire habituellement enjoué, en voici une que j’ai retrouvée, Mon intime étranger
J’étais allée voir Arrested Developpement l’automne dernier à La Sirène, comment aurais-je pu rater MC Solaar ? Les ados des années 90 comprendront. Ceux de maintenant, qui disent « Mac Solaar », moins. J’ai eu mes hits attendus, une petite berceuse nostalgique, et hop au dodo !
En chiffres : Les Francofolies de La Rochelle, un foisonnement d’artistes
Plus de 140 heures de concert et 150 000 festivaliers accueillis dans 14 lieux ! http://www.francofolies.fr/le-festival/en-images-2018/photosfestival2018-
Match de vestes roses lamées : Juliette Armanet versus Nolwenn Leroy
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